Association Sportive et Culturelle de Mazangé
L'Association
Le Tramway
                                   Le tortillard qui passait par Mazangé. 
 
 
 
Tortillard : définition du dictionnaire : nom masculin, familier ; Train d'intérêt local, au trajet tortueux, desservant de nombreuses localités. 


I Un peu d’histoire.
 
C’est par une décision monarchique de juillet 1842, qu’est créé le réseau des chemins de fer en France. Le maillage des réseaux va former une grande étoile avec Paris comme centre. Ainsi sont construites les lignes Paris-Bordeaux, Paris-Lyon-Marseille, Paris-Toulouse, etc. Le chemin de fer arrive en 1846 à Blois et il faut attendre 1865, pour que la voie ferrée atteigne enfin Vendôme. Ce maillage laisse complètement de côté les liaisons transversales en France. Ce manque de communication transversale se fait rapidement ressentir tout comme les liaisons dans et entre les départements.

C’est en juillet 1865 que sont assouplies les règles de construction des lignes ferroviaires ce qui permet à Vendôme d'être desservie par la ligne venant de Paris via Châteaudun. C’est aussi l’acte de naissance des chemins de fer d’intérêt local. L’élément novateur de cette loi sera le transfert des compétences de l’état aux départements. La décentralisation est née. C’est par la déclaration d’utilité publique que sera prise la décision de construire une ligne locale dont l’objectif principal est le désenclavement des zones rurales. 


II Le Loir et Cher.
 
Le conseil général du département est de plus en plus intéressé par les lignes ferroviaires locales. Il est décidé de relier Blois aux deux chefs-lieux d’arrondissement : Vendôme et Romorantin. Un rapport est commandé au voyer en chef Maurice. Celui-ci, après avoir souligné les nombreux avantages qui résulteront pour tous de ces voies ferrées, fait ressortir de son rapport l’accroissement de la valeur territoriale, industrielle et commerciale pour les localités traversées. Le préfet « de Soubeyran » ajoute à cela : « Vous êtes, Messieurs, en face d’un grand intérêt départemental à satisfaire.».

Le coût de construction des lignes est estimé à 3.440.000 francs dont plus de 2 millions incombent à la charge du département. Face à cette charge financière supplémentaire, il est proposé d’imposer au contribuable un supplément de 8 centimes par an pour le remboursement en 20 ans du crédit nécessaire. Mais face à la réalité de la situation financière, la collecte des impôts ne s’élevant qu’à 1.200.000 francs par an, la voix de la raison se fait entendre et le projet est ajourné. Ajouté à cela le harcèlement des élus locaux pour faire passer le chemin de fer par leur commune, on comprend aisément le retard dans la prise des décisions nécessaires. La seule décision prise dès le début est le choix du matériel et l’écartement de la voie, le « 1 mètre » ou voie métrique, ainsi que le fait que la voie doive emprunter au maximum les bordures des routes et que soit construit un minimum d’ouvrages d’art. La règle des trois fois quinze est adoptée : une locomotive de 15 tonnes circulant à 15 km/h sur des rails de 15 kg/m. Les mauvaises langues de l’époque raillent cette décision en disant qu’un coureur est plus rapide que le train !

 
III Le tramway de Vendôme à Mondoubleau.
 
Après la déclaration d’utilité publique de 1903, il faut attendre le mois de décembre 1906 pour voir les locomotives faire leurs premiers tours de roues sur les lignes Vendôme-Mondoubleau et le Gué du Loir-La Ville aux Clercs. Le prolongement vers Droué ne sera terminé qu’un peu plus tard. Le choix des gares et haltes est cornélien. Le maire de Lunay réclame le passage par sa commune, plus grande que Mazangé, sans se soucier de la topographie qui ne permet pas cette réalisation.

Afin de réduire au maximum le coût de la construction, il est impératif de suivre au mieux les voies naturelles et le relief, c'est-à-dire la rivière et les bas de collines. Autre impératif, construire le moins d’ouvrages de franchissement possible. Ainsi le Gué du Loir est choisi pour sa proximité avec Lunay et la place pour y construire la gare de transit. Afin de faire le moins de terrassement possible, la voie est installée dans la chaussée des routes existantes. Les bâtiments de gare sont standardisés et les appareils de voie sont le plus possible identiques. Ainsi dans chaque gare il y a une plaque tournante pour permettre de retourner la locomotive. Ce retournement s’effectue à la force des bras et jambes. Sachant qu’une locomotive pèse 15 tonnes en charge, on s’imagine aisément la tâche ardue pour le personnel.

  
IV Le chemin de fer arrive à Mazangé.
 
Le tracé. 
La difficulté pour les constructeurs consiste principalement dans le cahier des charges établi par le conseil général. La topographie de la région de Vendôme est moyennement vallonnée. Une ligne directe aurait occasionné la construction de plusieurs ouvrages de franchissement de vallons et rivières. Ces réalisations auraient augmenté considérablement le coût de la construction. Ainsi, la ligne ne traverse pas le Loir et la décision est prise d’adopter un tracé relativement sinueux au départ de Vendôme jusqu’à Epuisay.

Pour permettre de franchir le dénivellement entre Vendôme et Villiers-sur-Loir, la ligne suit le Loir en passant par Montrieux, Prépatour pour gravir une pente douce vers Villepoupin. La route de Villiers à Mazangé est assez plate et au Gué du Loir, devant le manoir de Bonaventure, se trouve une zone bien dégagée et très plate qui permet l’installation de la gare de transit et le départ de la ligne de La Ville-aux-Clercs et Droué. Donc, en longeant le bourg de Villiers, la ligne suit la route départementale actuelle D5 sur le côté gauche, c'est-à-dire côté Loir, après avoir franchit le pont existant sur le Boulon, passe par le « Pré des Anglais » pour contourner par l’arrière les bâtiments de l’actuel « Hôtel de la Bonnaventure » et se présenter face au parking du manoir. Après le manoir, la ligne principale passe devant le « Moulin d’Echoiseau » en direction de Mazangé en bas du talus de la route départementale D5 puis la route de Boutefée. Aujourd’hui c’est un chemin sans issue avec un escalier à son extrémité. La ligne rejoint l’actuelle « Rue de Boutefée » et passe derrière le bourg à l'emplacement de l'actuelle salle des fêtes pour desservir la gare de Mazangé qui se trouve sur le terrain de tennis. Sortant de Mazangé, la ligne suit la route de Fortan puis la route d’Epuisay pour rejoindre Le Temple, Cormenon et finalement Mondoubleau. 
 
Le Gué du Loir 
La ligne du tramway passe au ras des maisons dans le village du Gué du Loir. Ceci n’est pas sans poser quelques problèmes de voisinage. Aux archives départementales à Blois, sont consignés de nombreux documents demandant l’alignement des habitations et jardins par rapport à la voie ferrée. Globalement, le passage est bien perçu par la population car la ligne constitue un moyen de transport plus facile et plus rapide que les hippomobiles pour rejoindre Vendôme ou encore le marché aux chevaux de Mondoubleau, sans parler du transport de marchandises. Au début du vingtième siècle les voitures ne sont pas légion. Il est clair que le tramway est un plus pour la population sur le plan économique. D'autre part, de la main d’œuvre locale a très certainement été utilisée pour la construction et l’exploitation de la ligne. Le quotidien des habitants est rythmé par le passage des 6 convois journaliers, trois dans chaque sens. 
 
Mazangé 
Peu d'histoires et anecdotes sont connues concernant le tramway à Mazangé. Cependant, dans les archives départementales de Blois sont conservées quelques histoires d'accidents mettant en cause le train à vapeur. La gare de Mazangé fut démolie vers la fin des années 1960 pour laisser place à l’actuel terrain de tennis. Les plus anciens de nos habitants, originaires de Mazangé, ont connu cette époque lorsque la vie locale était rythmée par le passage du tramway. On entend de temps à autre dire « Ah mais moi j’ai connu le tram à Mazangé » mais finalement peu de récits sont enregistrés.
 
 
V La vie à bord du tramway. 
 
La composition des convois 
Le fait que les locomotives ne pèsent en charge avec combustible et eau que 15 tonnes, ne permet pas des rames très grandes. En règle générale les convois comportent deux à trois wagons de voyageurs, un plateau, et deux wagons fourgons ou un wagon couvert et une bétaillère. Les convois ainsi formés pèsent environ quarante tonnes ce qui est la limite pour gravir les pentes parfois raides du tracé. Les wagons voyageurs comportent deux essieux, le compartiment est doté d’une plate-forme d’accès à l’avant et à l’arrière. Les fenêtres sont sans vitrage et les bancs en bois. On est loin du confort de nos trains modernes. Le wagon plateau est souvent doté de ranchers (barres verticales sur les côtés) pour contenir les marchandises encombrantes tels que les billes de bois. Tous les wagons de marchandises ainsi que les bétaillères ne comportent que deux essieux et sont d’une longueur d’environ cinq mètres et d’une largeur maximale de deux mètres. 
 
La vie à bord du train 
Le fait que les fenêtres n’aient pas de vitres ne pose certainement pas de problème en été mais il en est tout autrement en hiver. Les hivers dans les années 1910 jusqu’en 1933 sont plus froids que maintenant. Les voyageurs, emmitouflés dans des vêtements chauds, se ruent à chaque halte dans le bâtiment de la gare pour être les premiers auprès du poêle et se réchauffer. Finalement, les plus heureux, question chaleur, sont le chauffeur et le conducteur car ils sont auprès du foyer de la chaudière de la locomotive. Le trajet de Vendôme à Mazangé, long de quatorze kilomètres, peut prendre plus d’une heure en hiver car une fois devant le poêle, il est bien difficile pour le chef de gare de faire embarquer les gens frigorifiés. Les jours de pluie et de vent les habitacles des wagons sont balayés par l’eau et l’air qui s'y engouffrent librement. L'été, c’est la poussière qui envahit les wagons. Mais malgré ces inconvénients, ce moyen de transport reste apprécié par les usagers.
 
 
VI Le déclin et la fin du tramway. 
 
Dans les années 1925 à 1930, un nouveau mode de locomotion est adopté par la Compagnie des Tramways du Loir et Cher. La « fée électricité » vient faire sa grande entrée dans la vie quotidienne. Parallèlement le moteur à explosion devient de plus en plus fiable et puissant ce qui permet de construire des voitures et autocars en plus grand nombre. Plus rapides et plus confortables, les autocars arrivent à supplanter petit à petit le tramway qui n’est plus utilisé que pour le transport des marchandises et du bétail et cesse définitivement de fonctionner en 1934.

Progressivement et au besoin de récupérer l’emplacement de la voie, cette dernière est démontée et ferraillée. Le matériel de traction est vendu aux entreprises telles les carriers, forestiers et autres usines nécessitant le transport au sein même du site de marchandises fabriquées. Beaucoup de petites locomotives terminent leur carrière dans l’industrie sucrière de la Beauce et les sites d’extraction de pierres et graviers. Certains fourgons et bétaillères sont partiellement démontés et servent d’abri de jardin chez le particulier. Des morceaux de rails ont été utilisés pour la construction de petits ouvrages de franchissement du Boulon comme la passerelle sur le Boulon à Vauracon. Toujours est-il que ce démembrement a fait les beaux jours des marchands de ferraille.
 
 
VII Que reste-il visible aujourd’hui ? 
 
Très peu de choses restent visibles de nos jours sur notre commune. C’est principalement concentré sur le Gué du Loir. Devant le Manoir de Bonaventure se trouve le réservoir d’eau qui alimentait jadis les locomotives. Ce petit édifice est malheureusement victime de vandalisme à répétitions. Plus loin, sous les arbres, chemin interdit maintenant aux véhicules à moteur, deux petits ponts métalliques qui permettent le franchissement de la rivière de Mazangé. Sur le pont de la route départementale 5, les rambardes des deux côtés de la route datent de l’année de construction de la ligne. A Mazangé même, il faut se rendre dans le sous-sol de la salle des fêtes pour pouvoir observer le mur de soutènement de la voie car la salle des fêtes est construite sur le trajet de la ligne. Pour voir comment était la gare il faut se rendre à Azé du côté du terrain de tennis. Là-bas se trouve, quasi intacte, la gare après son déplacement du centre du bourg. On y voit encore le panneau « AZE » au-dessus de la porte principale. Elle sert aux associations et club de tennis. Plus loin, dans le canton de Mondoubleau on peut voir encore quelques petits ponts en pierre où la ligne a été remplacée par une route goudronnée. Bref très peu de choses finalement.  
 
  
Bibliographie : Chers petits trains du Loir et Cher aux éditions cénomane La vie du Rail 
Fonds archives des Archives Départementales à Blois. 
Crédits photos : cartes postales anciennes. 

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